Extrait du rapport sur l’aide médicale à mourir pour les personnes en situation d’inaptitude

Extrait du rapport sur l’aide médicale à mourir pour les personnes en situation d’inaptitude

L’aide médicale à mourir pour les personnes en situation d’inaptitude : 

Le juste équilibre entre le droit à l’autodétermination, la compassion et la prudence

 

 

EXTRAIT concernant les personnes proches aidantes, pp. 134-136.

Recommandation 14

Que les efforts présentement consentis par le gouvernement en matière de soins palliatifs soient accentués et que les mesures nécessaires soient prises afin que des soins palliatifs de qualité et en quantité suffisante soient offerts partout au Québec, tant en établissement qu’à domicile, aux personnes qui en ont besoin, y compris les personnes inaptes et les proches aidants.

 

6.9.2. Le soutien aux proches aidants qui accompagnent les personnes en situation d’inaptitude

Les proches aidants font partie de la clientèle en soins de fin de vie et sont des acteurs clé de soutien de première ligne du réseau de la santé et des services sociaux. Ils jouent un rôle essentiel dans l’offre de soins et de services et contribueraient à 80% au maintien à domicile (RANQ, 2018). Un quart de la population québécoise serait proche aidante (RANQ, 2018). Selon l’Institut de la statistique du Québec (2015), la majorité des proches aidants âgés de 15 ans et plus sont des femmes. Chez les hommes comme chez les femmes, plus du tiers des proches aidants âgés de 15 à 64 ans soutiennent plus d’une personne en perte d’autonomie. Le Regroupement des aidants naturels du Québec (RANQ, 2018, p. i) définit les proches aidants comme ceci :

Personnes qui assurent volontairement des soins et des services sans rémunération à une personne de leur entourage ayant une ou des incapacités temporaires ou permanentes (accident, handicap, maladie, vieillissement, etc.) et pour la quelle elles ont un lien affectif (père, mère, conjoint, enfant, frère, sœur, voisin, ami, etc.).

Plusieurs proches aidants ne se considèrent pas comme tels. Par exemple, un conjoint peu trouver tout à fait normal de prendre soin de sa conjointe. De ce fait, ces proches aidants ne sont pas pris en compte dans les statistiques (RANQ, 2018). Néanmoins, on a constaté que bon nombre d’entre eux exécutaient des tâches de nature « professionnelle », comme l’administration de médicaments dans un papillon sous-cutané, l’installation de cathéters vésicaux et les soins de stomie ou de trachéostomie (Roy et D’Anjou, 2013). Ces services qui suppléent au manque de personnel professionnel sont effectués gratuitement, et on ne tient souvent pas compte de la capacité d’apprentissage du proche aidant, de sa maîtrise des compétences, de son consentement éclairé ou de celui de la personne aidée (Chalifoux, Boulet et Riopel, 2015, p. 37).

Depuis 2018, les proches aidants sont reconnus au Québec par la Loi sur les normes du travail. Environs 52,1% des proches aidants consacrent plus de huit heures par jour à un proche victime d’un AVC (Yu et al., 2013). Les proches aidants vivent une grande pression physique et émotionnelle (Aoun et al., 2017), qui n’est pas sans avoir de répercussions néfastes sur plusieurs plans : physiques (ex. : fatigue), psychologique (ex. : stress, dépression, épuisement), social (ex. : diminution de la socialisation et des activités de loisirs) et financier (ex. : pertes de revenus, difficultés financières à cause des coûts des soins) (L’appui pour les proches aidants d’aînés, 2016; RANQ, 2018; Institut de planification des soins, 2015).

Le proche aidant doit souvent faire de lourds sacrifices financiers ayant des conséquences néfastes pour la personne aidée (L’Appui pour les proches aidants d’aînés, 2015). Les proches aidants de personnes atteintes de démence on 45% de risque de présenter une détresse psychologique, alors que le risque diminue à 25% pour les proches qui s’occupent d’un aîné, qui ne manifeste pas de démence (Institut canadien d’information sur la santé, 2018). Le tiers des aidants éprouvent de la détresse et un plus grand besoin de soutien (Institut canadien d’information sur la santé, 2018). Ils pourraient présenter plusieurs facteurs de risque de détresse suicidaire (Viau-Quesnel et Teadale, 2019). Lorsque le proche aidant est lui-même âgé et en mauvaise santé, ses risques de décéder avant la personne aidée augmentent de 63% au cours des trois premières années de la prise en charge (Association des proches aidants de la Capitale-Nationale, 2019). Une étude actuellement en cours au Québec et dirigée par la Professeure Sophie Éthier présente également des résultats préliminaires troublants sur la maltraitance envers les proches aidants qui provient de la personne aidée, de l’entourage, des établissements du réseau de la santé et des services sociaux ainsi que d’autres établissements (Larochelle, 2019).

Le caractère indispensable du soutien à offrir aux proches aidants est fréquemment rappelé (Institut canadien d’information sur la santé, 2018; Institut de planification des soins, 2015). Comme l’écrit la Fédération des mouvements personne d’abord du Québec, « les aidants naturels ne pourront pas seuls, supporter le poids de l’accompagnement dans les soins de fin de vie pas plus qu’ils ne peuvent le faire tout au long de la maladie » (FMPDAQ, 2013, p.6). En effet, leur rôle est crucial lorsqu’il s’agit d’accompagnement des personnes inaptes qui ont fait une demande anticipée d’AMM. Le proche aidant est une source d’information inestimable pour les médecins et l’équipe multidisciplinaire qui auront à traiter une demande anticipée d’AMM : il connaît la personne malade, ses valeurs les plus profondes, ce qui comptait pour elle et sa vie fin de vie. Il peut témoigner de ce qu’elle aurait souhaité ne pas subir. Le proche aidant est aussi susceptible d’être le tiers désigné par la personne qui fait la demande anticipée d’AMM. Reconnaître au proche aidant un statut officiel et lui fournir le soutien économique, social et professionnel essentiel à la réalisation de sa mission comptent parmi les conditions favorables au succès de la révision de la LCSFV proposée par le groupe d’experts.

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